Voilà maintenant quatre ans que Rafael Nadal se balade. 31 victoires en autant de rencontres, il est imbattable Porte d’Auteuil et personne n’imagine une seconde le voir trébucher en 2009. Lors des huitièmes de finale, l’Espagnol retrouve Robin Söderling. Sur le papier, l’opposition ressemble à une promenade de santé pour le maître des lieux. Le Suédois s’apprête pourtant à signer un exploit monumental mais ça, personne ne l’imagine, même pas lui. 

La dernière fois que les deux hommes se sont affrontés, c’était un mois plus tôt sur la terre battue de Rome. Le score ? 6-1, 6-0 en 1h24. Le rouleau compresseur Nadal avait eu raison du Suédois, dominé dans tous les compartiments du jeu. Quelques semaines plus tard, le n°1 mondial fait ce qu’il a l’habitude de faire à Paris, se balader sur le terrain et marcher sur ses adversaires. Söderling a lui déjà perdu un set et disputé quatre jeux décisifs en trois matches.

STUPÉFACTION GÉNÉRALE

Voir Rafa s’incliner en ce dimanche 31 mai 2009 est impensable. Mais en 34 minutes, devant un court Philippe-Chatrier abasourdi, Robin Söderling vire en tête après avoir empoché le premier set 6-2. Une manche offerte par Nadal sur deux énormes fautes de revers. Il semble perdu sur le terrain, en panne d’idées. Sonné par les grands coups droits de son adversaire, le Majorquin plie. Son impression de puissance, habituelle à Roland-Garros, laisse place à une fragilité inédite. Mais l’animal, blessé dans son orgueil et malmené dans le jeu, fait parler l’éternel mental d’acier qui le caractérise, ce «fighting spirit» admiré de tous.

En breakant son adversaire au début du deuxième set, Nadal fait mal au moral du Suédois de 24 ans. On se dit alors que ce n’était qu’un mauvais moment et qu’un autre match commence. C’était sans compter sur Robin Söderling qui, opportuniste, profite de l’étrange baisse de régime de Nadal pour recoller au meilleur moment, à 5-5, sur une superbe volée amortie de revers. Néanmoins, Rafa assure et, au bout d’un tie-break maîtrisé durant lequel il aura mené 6 points à 0, il recolle à une manche partout (7-6). Le taureau de Manacor est loin de son meilleur niveau mais il s’accroche. Dans le troisième set, les deux hommes se répondent coup pour coup.

TOUT SIMPLEMENT PLUS FORT

C’est dans le tristement célèbre septième jeu, que tout tennisman qui se respecte craint de perdre autant qu’il espère le gagner, que l’Espagnol craque. Le Suédois ne se fait pas prier pour prendre le service de son adversaire, méconnaissable. Robin Söderling, n°25 à l’ATP, épate la galerie et prend le jeu à son compte. Le quadruple tenant du titre subit et perd le troisième set (6-4) sur un jeu blanc. Pour la première fois de sa carrière, Rafael Nadal est dos au mur à Roland.

Le Majorquin prend rapidement le service de son adversaire pour mener 2-0 dans ce quatrième set mais Söderling recolle immédiatement sur un jeu blanc offert sur un plateau. La machine est grippée depuis 2h40 maintenant. Les deux protagonistes restent impériaux sur leur service et doivent disputer un jeu décisif. Les gifles de coup droit du Suédois ébranlent ce qui reste d’un Nadal affaibli. Il s’offre cinq balles de match. La seconde est la bonne. Sur un ultime passing de revers, l’Espagnol envoie sa demi-volée mourir dans le couloir. En 3h30, Robin Söderling vient de faire tomber le mythe dans son antre. «Je ne voulais pas qu’il me fasse courir. Je voulais que ce soit moi qui dicte l’échange avec mon coup droit et mon revers à plat. J’ai joué exactement comme je le voulais», racontera le Suédois à la sortie de son retentissant exploit.

L’explication de Jo-Wilfried Tsonga, dans un récent live Twitch avec Gaël Monfils, explique pourquoi le mental exceptionnel du Majorquin n’aura pas suffi ce 31 mai 2009, jour où l’impensable s’est produit. «On savait tous que Nadal avait une angine et qu’il n’était pas bien du tout», a en effet révélé le Manceau. Le silence de l’Espagnol à ce sujet nous donne une belle leçon d’humilité. La cicatrice de sa première défaite Porte d’Auteuil sera bien vite effacée puisque Nadal remportera les cinq éditions suivantes de Roland-Garros. Circulez, il ne s’est rien passé. En attendant, c’est Roger Federer qui a enfin raflé la mise à Roland-Garros en 2009… en battant Robin Söderling en finale.