La journée a commencé sous la pluie, fil rouge annoncé de la quinzaine. Heureusement, le jeu a pu reprendre son cours en début d’après-midi, avec son lot de surprises, de déconvenues, de balades. Et un match épique, celui d’un Français dont le match avait été interrompu dimanche soir à un set partout. Le duel de Corentin Moutet aura duré, duré… Au total, 6h05 et une cruelle défaite 18-16 au cinquième set… Dans le tableau féminin s’est côtoyé le pire et le meilleur. Thiem, de son côté, a assuré, Daniil Medvedev s’est fait sortir, tout comme Félix Auger-Aliassime et Fabio Fognini. Les Français, eux aussi, ont subi. Et Nadal dans tout ça ? Une victoire sans forcer. 

AUGER-ALIASSIME, FOGNINI ET MEDVEDEV DÉJÀ DEHORS

Il y a des journées plus difficiles que d’autres. Félix Auger-Aliassime et Fabio Fognini pourront en témoigner. Tous les deux largement favoris de leurs duels respectifs face à Nishioka et Kukushkin, ils ont pourtant cédé dès leur entrée en lice. FAA pourra nourrir des regrets, au moins aussi nombreux que ses balles de breaks (13 pour seulement 2 converties). Jamais dans le rythme face à Yoshihito Nishioka, le futur du tennis canadien a montré pourquoi il n’était pas encore le présent : 7-5, 6-3, 6-3. Pour Fognini, le problème était d’un ordre différent. L’Italien, de retour de blessure juste à temps pour disputer le Majeur parisien, n’a pas tenu la cadence et a même semblé blessé en fin de rencontre. Face au Kazakh Kukushkin, qui a su saisir sa chance, le Transalpin n’a pas fait le poids et a littéralement balancé le match, s’inclinant en quatre manches.

Mais la plus grosse surprise de ce premier tour a certainement eu lieu à l’heure où tout le monde côtoyait Morphée. Dans la fraîche nuit de la Porte d’Auteuil, où le mercure dépassait difficilement les 10 degrés, Daniil Medvedev a disparu. Comme l’an passé, le géant russe s’est troué d’entrée. Maladroit, mal en jambes et mal luné, il a laissé filer Marton Fucsovics au deuxième tour. Le Hongrois, habitué, si ce n’est à couper des têtes, à faire trembler les meilleurs dans les premiers tours des Grands Chelems, n’a pas failli à sa réputation. Solide et concentré, il a même fait dégoupiller Medvedev au point de le voir fracasser sa raquette et écoper d’un point de pénalité… Sur balle de set dans le tie-break de la deuxième manche ! Hors du coup, Daniil Medvedev n’a pu rattraper le retard accumulé, encaissant même un cinglant 6-1 dans le quatrième et dernier set. Le Russe n’a encore jamais remporté le moindre match à Roland-Garros en quatre participations. Mais au rayon des déconvenues, ce sont les Français qui se sont cependant taillés la part du lion. 

LE JOUR LE PLUS LONG

On sait quand un match démarre mais jamais quand il s’arrête. C’est, au fond, une des plus belles incertitudes de ce sport. Ce qui en fait toute sa beauté, toute sa cruauté aussi. Demandez donc à Corentin Moutet. Le Français a démarré son match dimanche soir, sous un temps plus que maussade. Pas inquiet pour un sou, il a expédié la première manche avec un cinglant 6-0. Oui mais voilà, face à lui, Lorenzo Giustino était d’humeur bagarreuse. L’Italien, qui n’a jamais connu mieux qu’une 127ème place à l’ATP, a donné du fil à retordre à Moutet. Le match a été finalement interrompu dimanche soir pour reprendre ce lundi en début d’après-midi. Mené deux sets à un, le Tricolore s’est réveillé et a remporté la quatrième manche (6-2). On pensait alors que le match avait basculé et que Moutet allait s’envoler vers la victoire. Mais c’était sans compter sur Giustino.

Redescendu à la 157ème place mondiale, le Transalpin a fait de la résistance, encore et toujours. 6-6, 9-9, 14-14, 16-16, il n’a rien lâché, même quand il a perdu sa mise en jeu pour laisser Corentin Moutet servir pour le match à trois reprises. Mais à chaque fois, il est revenu. Et ce qui devait arriver arriva. Après six heures et cinq minutes d’une épreuve mentale, à défaut d’un niveau de jeu exceptionnel, c’est l’Italien qui l’a emporté. Le deuxième match le plus long de l’histoire du tournoi a connu un terrible dénouement pour le clan tricolore. Il pourra toujours trouvé du réconfort auprès de Nicolas Mahut, protagoniste du match le plus long de l’histoire du tennis (11h05) à Wimbledon en 2010.

Si le Santoro-Clément de 2004 reste intouchable, voilà la victoire de PHM face à John Isner reléguée à la troisième marche du podium. Pas sûr que ce Moutet-Giustino laisse une trace aussi indélébile, mais la statistique n’est pas toujours esthétique. Pour Gaël Monfils non plus, il n’y avait pas d’esthétique. La Monf’ a été sortie par Bublik en quatre sets et 2h35 de jeu. C’est le Kazakh qui s’est montré le plus adroit, en exécutant notamment un lob-tweener qui restera sans aucun doute dans le Top 5 des points de la quinzaine. Devant dans toutes les manches sans pour autant s’être montré particulièrement dangereux, le n°9 à l’ATP, qui n’a pas remporté un seul match depuis son retour à la compétition, prend déjà la porte, et la plus petite qui soit. Pas mieux pour Adrian Mannarino, balayé en moins de deux heures par Albert Ramos-Viñolas. Au final, peu de Tricolores ont aisément tenu leur rang. 

SUR UNE AUTRE PLANÈTE

Comme souvent, il fallait s’en remettre à l’élite parmi l’élite pour être rassuré. Opposé à Marin Cilic, Dominic Thiem a répondu présent en écartant le Croate sans essuyer de sueurs froides. Malgré un Cilic accrocheur, l’Autrichien, finaliste des deux dernières éditions et récent vainqueur de l’US Open, s’est imposé en 2h06. Soit une petite minute de plus que Rafael Nadal. Opposé au modeste Biélorusse Egor Gerasimov, l’Espagnol a eu du mal à se mettre en jambes. Le maître des lieux a mis un peu de temps à trouver son rythme sur le Chatrier auréolé de son tout nouveau toit. Au final, le 83ème joueur mondial a subi la loi du roi de la terre en s’inclinant en trois sets (6-4, 6-4, 6-2). Mais Nadal s’est contenté d’assurer et ne s’est pas complètement rassuré. Pas plus que ces dames d’ailleurs. 

Ni Elina Svitolina, ni Serena Williams, ni même Kiki Bertens ou Garbiñe Muguruza ne sont sorties de leur succès inaugural avec le plein de confiance. Si ce premier tour n’a pas été transcendant, elles ont au moins le mérite d’être qualifiées. Angelique Kerber, elle, n’a même pas eu cette chance. Méconnaissable, l’Allemande a pris l’eau dès son entrée en lice avec une défaite sèche contre Kaja Juvan (6-3, 6-3). Mais il y a pire en la personne de Marketa Vondrousova. La Tchèque, finaliste surprise l’an passé, a vécu un véritable cauchemar… En à peine plus d’une heure, la tête de série n°15 a été littéralement balayée par Iga Swiatek (6-1, 6-2).

LES GRANDS ÉCARTS

Finalement, celle qui s’en sort le mieux dans le tableau féminin, c’est peut-être Amanda Anisimova. La jeune Américaine n’a même pas passé une heure sur le court avec un brutal 6-2, 6-0, infligé à son adversaire, l’Allemande Tamara Korpatsch. A 19 ans, elle confirme petit à petit tous les espoirs placés en elle. Du côté des Françaises, Océane Dodin n’a pas fait le poids face à Petra Kvitova. Dans un duel 100% tricolore, Chloé Paquet aura bien tenté d’accrocher Alizé Cornet, mais la plus expérimentée des deux a eu le dernier mot (6-3, 6-2). 

Enfin, la journée s’est achevée après minuit avec la belle image de Clara Burel. Mal embarquée, la Française a su réagir et trouver les ressources pour disposer d’une adversaire coriace, la Néerlandaise Arantxa Rus. Après sa victoire au cœur de la nuit parisienne, la jeune Tricolore n’a pu s’empêcher de courir vers les gradins pour se blottir dans les bras de sa mère, laissant échapper quelques larmes après trois heures d’un combat acharné sur le court. Un instant émouvant, plein de tendresse, qui ne laissera personne indifférent.

A consommer sans modération. 

SACRÉ NELSON

Cette année, pandémie de coronavirus oblige, il n’y a pas grand monde dans les allées de Roland-Garros. Par conséquent, on entend facilement tout ce qu’il se dit autour de chaque court. Le Français Elliot Benchetrit et l’Américain John Isner ont pu le vérifier lors de leur match du premier tour puisqu’ils ont été interrompus par… Nelson Monfort !

En train de faire un direct depuis une terrasse surplombant le court, l’emblématique journaliste de France Télévisions a mis du temps à comprendre qu’il dérangeait les deux joueurs un peu plus bas, malgré plusieurs appels lancés par l’arbitre et le public. Une scène cocasse qui donne un peu de légèreté à ce climat lourd entourant le tournoi… Merci pour ce moment cher Nelson !