A quelques heures de l’année 2021, il est temps de revenir sur une année 2020 complètement dingue… Première partie entre janvier et juin.

JANVIER 2020

Le mois de janvier rime toujours avec Melbourne et Grand Chelem. Premier grand rendez-vous de la saison, l’Open d’Australie permet de prendre la température du circuit pour avoir un aperçu de ce qui nous attend le reste de l’année… Problème, la température était déjà élevée pour de mauvaises raisons en Australie à cause des incendies qui ont réduit en cendres des milliers d’hectares de forêts et enveloppé la plupart des grandes villes du pays d’un épais nuage de fumée toxique, dont Melbourne…

En début d’année, Novak Djokovic a glané son 8ème trophée à l’Open d’Australie et surtout son 17ème en Grand Chelem pour se rapprocher un peu plus de Rafael Nadal et Roger Federer. © Australian Open

Après la menace d’un report, voire même d’une annulation pure et simple du tournoi, la premier Majeur de la saison s’est finalement déroulé aux dates prévues. Et comme souvent ces dernières années, c’est Novak Djokovic qui s’est imposé. En finale, le Serbe a disposé non sans mal de Dominic Thiem. A l’issue d’une bataille en cinq sets, durant laquelle il n’est parfois pas passé loin de la correctionnelle pour son attitude avec l’arbitre, le natif de Belgrade a finalement glané son 8ème trophée à l’Open d’Australie et surtout son 17ème en Grand Chelem pour se rapprocher un peu plus de Rafael Nadal et Roger Federer.

De son côté, Dominic Thiem ne le savait pas encore, mais il avait pris rendez-vous avec l’avenir…

FÉVRIER 2020

Après un Open d’Australie lors duquel il a été balayé par Dominic Thiem, Gaël Monfils a repris des couleurs en février… Et de quelle manière ! En l’espace de quatre semaines, le Français a aligné 12 victoires consécutives ! Une performance qui lui a permis d’engranger 850 points au classement ATP. Durant cette période faste, le joueur tricolore a remporté deux titres, à Montpellier et à Rotterdam, avant de rallier le dernier carré à Dubaï, où Novak Djokovic a mis fin à sa belle série.

En l’espace de quatre semaines, Gaël Monfils a aligné 12 victoires consécutives et remporté deux titres. Une première pour lui. © Open Sud de France

Remporter deux tournois dans une même saison, c’est une première pour Gaël Monfils. Deux tournois consécutifs en autant de semaines d’ailleurs… Pour quelqu’un qui n’aimait pas trop les dimanches (21 finales perdues sur 31), le Français s’est senti beaucoup mieux d’un coup en faisant mentir les statistiques en février. Et c’était tant mieux alors que le tennis tricolore faisait franchement peine à voir à Melbourne. Tout portait à croire que la Monf’ connaîtrait d’autres dimanches encore plus radieux cette année… Mais c’était sans compter sur un virus qui a tout chamboulé le mois suivant.

MARS 2020

En mars, le circuit prend toujours la direction de la Vallée de Coachella pour débuter la traditionnelle tournée américaine. Première étape donc : le désert californien avec le Masters d’Indian Wells. Ce que les joueurs ne savaient pas encore, c’est qu’ils allaient entamer une vraie traversée du désert. Et pour cause, avant même que les premières balles ne soient échangées dans le «Tennis Paradise», le Covid-19 s’est invité à la fête pour mieux la gâcher.

Tommy Haas, le directeur du tournoi, a pris ses responsabilités face à la situation en décidant d’annuler l’événement considéré comme le «Cinquième Grand Chelem». Si cette lourde décision a semblé prématurée pour certains sur le moment, elle ne souffre aujourd’hui d’aucune contestation. C’est un cluster potentiellement meurtrier qui a été évité en Californie. L’annulation d’Indian Wells fut suivie dans la foulée par celle du Masters de Miami. Le point de départ d’une longue suspension pour le circuit… et le monde entier.

Opéré du genou droit en février, Roger Federer ne se doutait certainement pas qu’un virus se chargerait de mettre la petite balle jaune à l’arrêt quelques semaines plus tard…

AVRIL 2020

Habituellement, le mois d’avril donne le coup d’envoi de la saison sur terre battue qui doit mener le circuit jusqu’à Roland-Garros fin mai. Mais pas cette année… Suspendue depuis Indian Wells, la petite balle jaune s’est prise une sacrée gifle le 1er avril avec l’annonce de l’annulation de Wimbledon, le plus prestigieux tournoi de tennis au monde, à cause de ce satané coronavirus. Depuis la Seconde Guerre mondiale, c’est tout simplement la première fois qu’un tournoi du Grand Chelem est annulé. Pas de poisson d’avril hélas, mais une véritable bombe qui résume à elle seule la gravité d’une situation digne d’une guerre. Une guerre sanitaire. Le même jour, l’ATP et la WTA portaient le coup de grâce, la mort dans l’âme, avec l’annonce logique de la suspension des circuits professionnels jusqu’à la mi-juillet.

Après une finale d’anthologie entre Federer et Djokovic en 2019, le tournoi de Wimbledon a été annulé en 2020 à cause de la pandémie de Covid-19. © Wimbledon

Dans son malheur, Wimbledon n’a pas été le plus à plaindre. En effet, et allez savoir pourquoi, les organisateurs du tournoi anglais avaient souscrit il y a quelques années une assurance annulation comprenant une clause spéciale «pandémie». Le flegme britannique dans toute sa splendeur… Si cette police d’assurance s’élève à sept chiffres selon le Daily Mail, elle a valu son pesant d’or dans cette période délicate et permis à Wimbledon d’amortir les conséquences financières de l’annulation d’un tournoi qui rapporte chaque année environ 250 millions de livres sterling, soit plus de 280 millions d’euros.

Et si une attaque terroriste ou le décès de la reine Elisabeth II venaient à se produire un jour pendant Wimbledon, le tournoi est également assuré. Les organisateurs ont tout prévu… Ce n’est pas le cas de la FFT (et on peut le comprendre) qui a pris tout le monde par surprise en annonçant quelques jours plus tôt le report de Roland-Garros à l’automne. Mais ce n’est pas Rafael Nadal qui s’en plaindra…

MAI 2020

Après la stupéfaction, la réaction. Alors que le monde se déconfine petit à petit en mai, les joueurs reprennent le chemin de l’entraînement avec des consignes sanitaires drastiques, à l’image de Grégoire Barrère sous l’oeil de Marc Gicquel, masqué sur le court. Pendant ce temps, les différentes structures du tennis mondial s’organisent pour venir en aide aux acteurs de la petite balle jaune. Dans ce sens, la FFT débloque une enveloppe de 35 millions d’euros pour aider le tennis français à surmonter cette crise du coronavirus : 21 millions d’euros pour les clubs, 5 millions d’euros pour les entraîneurs et 9 millions d’euros pour les joueurs, arbitres et tournois.

La nouvelle normalité en temps de pandémie : Grégoire Barrère s’entraîne sous l’oeil de Marc Gicquel, masqué sur le court. © FFT

De leur côté, les sept instances dirigeantes du tennis mondial (ATP, WTA, ITF et les quatre tournois du Grand Chelem) présentent un programme d’urgence de près de 6 millions d’euros pour soutenir financièrement près de 800 joueuses et joueurs professionnels. Ce fonds est né dans la foulée du plan proposé par Federer, Nadal et Djokovic pour aider leurs collègues qui se retrouvent dans une situation financière délicate avec l’arrêt du circuit. L’idée était que chaque joueur du Top 100 mette la main à la pâte en fonction de son classement via un barème dégressif. Mais Dominic Thiem avait d’emblée déclaré qu’il ne contribuerait pas, estimant que beaucoup parmi les joueurs mal classés ne donnent pas tout sur le court.

Même dans les périodes difficiles, l’heure n’est pas toujours à l’unité… Mais comment en vouloir à Thiem ? Depuis la fin du XXème siècle, qui a vu l’émergence des circuits WTA et ATP, le tennis mondial est confronté à une crise de gouvernance qui n’a fait que s’aggraver au fil du temps. D’où l’idée de Roger Federer de fusionner les circuits ATP et WTA…

Un rapprochement bientôt effectif ? Seul le temps le dira…

JUIN 2020

Si certains ont profité du confinement pour travailler sur soi-même, d’autres ont fait mûrir des projets étonnants. Et cela s’est traduit par un mois de juin délirant… Ainsi, Patrick Mouratoglou a voulu réinventer le tennis avec l’Ultimate Tennis Showdown (UTS) qui propose une avalanche de nouvelles règles. Avec des quart-temps de 10 minutes, des temps-morts à la demande des entraîneurs ou encore des cartes magiques, l’entraîneur français de Serena Williams a voulu mettre de la NBA et du Pokémon dans un mixeur pour donner vie à un cocktail (imbuvable) qui n’a rien à voir avec le tennis. Mais qu’importe, l’objectif de Mouratoglou, c’était de proposer un produit marketing qui plaît aux fameux Millennials. Vous savez, ces jeunes de moins de 35 ans qui ne sont apparemment pas capables de rester plus d’une heure devant un match de tennis. Avec l’expérimentale UTS, le coach tricolore disait vouloir «explorer ce que pourrait être le tennis de demain». Franchement, on se passera bien volontiers d’un concept qui se rapproche plus d’une mauvaise parodie que d’une ébauche sérieuse du futur du tennis.

Mais qu’importe, Patrick Mouratoglou a eu au moins le mérite d’essayer d’innover dans cette période, propice aux expériences avec l’arrêt du circuit, dans un respect absolu des règles sanitaires. Et dans ce cadre, on aurait franchement encore plus aimé se passer de l’amateurisme de l’Adria Tour porté par un certain Novak Djokovic. Sur le papier, ce projet était louable, puisqu’il s’agissait d’une compétition-exhibition itinérante dans les Balkans pour collecter de l’argent qui serait reversé à des organisations caritatives. Problème, l’événement, qui a débuté en Serbie avant de se poursuivre et de s’arrêter définitivement en Croatie, s’est déroulé de manière lunaire. Aucune distanciation sociale, aucun geste barrière, aucun masque, aucun test… Dans les stades pleins des Balkans, on aurait un temps cru que l’épidémie de Covid-19 n’était plus qu’un lointain souvenir et qu’on était de retour dans le monde d’avant.

Au départ, cette vitrine surréaliste était belle avec un casting prestigieux (Djokovic, Thiem, Zverev, Dimitrov…), des tribunes pleines, des accolades sur le court, des bains de foule et même des soirées endiablées dans des boîtes de nuit. (On rappelle que le secteur de la fête et de la nuit est le plus touché par la crise du coronavirus et ne voit toujours pas le bout du tunnel.) Pendant quelques jours, l’illusion était parfaite… Mais le Covid-19 n’a que faire du statut de Djokovic et de ses acolytes, ou du fait que les pays des Balkans étaient relativement épargnés à cette période… Dès qu’il peut frapper, il frappe. Et le virus a fini par frapper très fort à Zadar, en Croatie. Ainsi, Djokovic, Dimitrov, Coric ou encore Troicki ont été testés positifs au Covid-19.

Carton rouge pour le «Djoker» qui a trop pris à la légère cette épidémie… Restant dans sa bulle de bonheur, il a créé, malgré lui, un cluster. Et malgré plusieurs semaines de recul après ce malheureux épisode qui a mis fin prématurément à l’Adria Tour, le Serbe a eu une réaction… étonnante dans les colonnes du New York Times. «Est-ce que je vais être tenu responsable pour toujours pour une erreur ? A vous de juger si c’est juste. Mais je sais que les intentions étaient bonnes, et si j’avais l’opportunité de faire à nouveau l’Adria Tour, je le referais», s’est-il défendu. Et d’ajouter : «Comment peut-on tenir responsable de tout une seule personne ? Je ne pense pas avoir fait quoi que ce soit de mal pour être honnête. Je suis désolé pour les personnes qui ont été infectées mais est-ce que je me sens responsable pour toutes les contaminations qui ont eu lieu depuis ce moment-là en Serbie, en Croatie et dans la région ? Bien sûr que non. C’est comme une chasse aux sorcières.»

On vous laisse seul juge de paix de ce drôle de mois de juin…