L’Américaine Sofia Kenin s’est imposée ce samedi en finale de l’Open d’Australie face à Garbiñe Muguruza, 4-6, 6-2, 6-2 en 2h03. Elle soulève ainsi son tout premier titre du Grand Chelem à seulement 21 ans. 

Des quatre demi-finalistes, c’était sans doute l’outsider. Même après avoir sorti la n°1 mondiale Ashleigh Barty, qui jouait à domicile, peu auraient misé sur la jeune Américaine. Mais grâce à son énorme force de caractère et son tennis engagé, Sofia Kenin a su retourner la situation pour dominer l’expérimentée Espagnole, déjà titrée deux fois en Grand Chelem. Pourtant, l’expérience, c’est ce qui a beaucoup manqué à l’Américaine. Tendue en début de match, Kenin est passée près de la correctionnelle en effaçant deux balles de double break à 4-2. Revenue à quatre partout, la pression a refait surface et la 15ème joueuse mondiale s’est à nouveau crispée. De l’autre côté du filet, Muguruza, avec trois finales de Grand Chelem à son actif, a fait parler sa gestion de l’événement pour jouer deux jeux de qualité et aller chercher le set, 6-4. Mais alors que l’Espagnole devait passer la vitesse supérieure pour étouffer la jeune Américaine, c’est une Sofia Kenin transfigurée qui a repris l’avantage dans le jeu comme au score.

Un chiffre illustre parfaitement ce retournement de situation. À l’issue de la première manche, Kenin totalisait 15 fautes directes. Le match terminé, le compteur en affiche 23, soit 8 dans les deux derniers sets. Elle aura donc fait deux fois moins de fautes dans les deux derniers actes par rapport au premier. Dominatrice dans le jeu, surtout dans la filière longue, efficace en coup droit, mais surtout impériale en revers, la Moscovite de naissance a su garder la tête froide. Menée 0-40 à 2-2 dans l’ultime manche, elle a sorti de sa raquette cinq superbes points pour retrouver sa chaise en tête. Garbiñe Muguruza ne marquera plus un jeu. La fougue de la jeunesse aura eu raison de l’expérience de l’Espagnole. Et comme un symbole, la championne de Roland-Garros en 2016 commettra une ultime double-faute, sa huitième du match, pour offrir le titre à sa jeune adversaire.

«LES DEUX PLUS BELLES SEMAINES DE MA VIE»

Pour son premier discours (pour lequel elle aura «essayé de faire de son mieux»), la lauréate de cet Open d’Australie n’a pas caché son émotion. «Mon rêve est devenu réalité. Je ne peux pas décrire ce que je ressens, je suis si émue. Les rêves se réalisent, si vous travaillez pour, ils deviennent réalité.» Lucide au moment de recevoir le trophée des mains de Lindsay Davenport (triple lauréate en Grand Chelem, victorieuse à Melbourne il y a 20 ans), l’Américaine sait qu’elle a réalisé un match solide, une performance digne de l’événement. Son caractère volcanique et sa fâcheuse tendance à râler (même quand elle gagne le point, voire le jeu) ne l’ont pas empêché de rester très concentrée, sûre d’elle et de son jeu.

Infaillible lors de cette quinzaine australienne, Sofia Kenin avait déjà affiché un niveau de jeu intéressant Porte d’Auteuil l’an passé, s’inclinant en trois manches face à Ashleigh Barty en huitièmes de finale. C’était, avant cette épopée à l’autre bout du monde, son meilleur résultat en Grand Chelem. C’est lors de cette même année 2019 qu’elle avait glané ses premiers titres sur le circuit WTA, à Hobart, Majorque et Guangzhou. Des titres prometteurs mais pas forcément annonciateurs d’un sacre en Grand Chelem non plus. Son palmarès s’étoffe désormais d’un titre doté de bien plus de valeur (en addition d’un chèque de plus de 2,5 millions d’euros), une victoire en Grand Chelem qu’elle ambitionnait déjà de décrocher un jour alors qu’elle n’avait que 7 ans.

Si c’est la huitième lauréate différente sur les douze derniers Majeurs, elle tentera désormais de s’installer sur le trône de la WTA. D’autres toutes jeunes gagnantes en Grand Chelem ont tenté de prétendre à cette place (Naomi Osaka, Bianca Andreescu ou Jelena Ostapenko en tête) et toutes connaissent pour l’instant les pires difficultés pour confirmer les espoirs placés en elles. Alors, le tennis féminin pourra-t-il enfin trouver une stabilité à son sommet avec Sofia Kenin ? L’histoire récente le démontre, rien n’est moins sûr… Mais pour l’heure, celle qui sera lundi n°7 mondiale (un record de précocité pour une joueuse américaine depuis une certaine Serena Williams) peut fêter dignement un titre mérité.