Sur le papier, il y a forcément un joueur qui sort du lot au moment de désigner les favoris de l’US Open. Ce joueur, c’est évidemment Novak Djokovic. Vainqueur des trois premiers tournois du Grand Chelem de la saison, le Serbe apparaît logiquement comme l’archi-favori du dernier Majeur de la saison à New York où il partira à la conquête d’un Grand Chelem calendaire qui n’a plus été réalisé depuis Rod Laver en 1969. A Wimbledon, il paraissait même intouchable, comme habité par l’esprit d’une mission divine qu’il doit accomplir. Mais la soif de gloire du «Djoker» l’a poussé à se rendre à Tokyo pour tenter de réaliser le «Golden Slam» et cela s’est mal terminé… Alors en lice pour deux titres olympiques, en simple et en double mixte, le Serbe a tout perdu en 24 heures dans la capitale japonaise, au point d’en repartir bredouille et quelque peu meurtri, physiquement et mentalement.
Depuis, Novak Djokovic n’a pas repris le chemin de la compétition, prenant soin de se reconstruire une caisse physique infaillible et un mental d’acier pour partir à la conquête d’un 21ème titre du Grand Chelem, qui le placerait au-dessus de tout le monde dans l’histoire du tennis. Sauf que pendant que le natif de Belgrade tente de soigner ses bobos et de chasser ses doutes, il y en a qui ont fait le plein de confiance ces dernières semaines. Et je pense évidemment à Alexander Zverev et Daniil Medvedev… Les deux joueurs savent ce que c’est de disputer une finale de Grand Chelem et ils semblent dans des dispositions idéales pour enfin briser un plafond de verre que seul Dominic Thiem est parvenu à briser l’an passé.
ZVEREV SE SENT POUSSER DES AILES DEPUIS SON TITRE OLYMPIQUE
Après avoir vécu une finale très traumatisante contre l’Autrichien à l’US Open en 2020 (il avait deux sets et un break d’avance), Alexander Zverev semble dans la meilleure période de sa carrière actuellement. Et malgré un début d’année en dents de scie, il est progressivement monté en puissance à partir de la saison sur terre battue, durant laquelle il a remporté le Masters 1000 de Madrid, en sortant Nadal, Thiem et Berrettini, avant de s’incliner en cinq sets à Roland-Garros lors de sa demi-finale contre Stefanos Tsitsipas. Si le gazon ne lui a pas souri, ce fut différent aux Jeux Olympiques…
A Tokyo, l’Allemand a frappé très fort en parvenant à renverser un Novak Djokovic qui semblait pourtant lancé vers la médaille d’or olympique. Zverev a sorti le grand jeu en glanant 10 des 11 derniers jeux lors de son duel contre le Serbe pour rallier la finale. Et là où on aurait pu penser que «Sascha» avait peut-être joué sa finale un match trop tôt, il n’en fut rien. Zverev a tout simplement écrasé le pauvre Karen Khachanov pour devenir champion olympique. Galvanisé par son séjour réussi à Tokyo, il a repris la compétition à Cincinnati avec succès. Impeccable dans l’Ohio, l’Allemand a fait parler sa force de caractère pour venir à bout de Stefanos Tsitsipas aux portes de la finale avant de rouler sur Andrey Rublev. L’occasion pour Zverev d’ajouter un cinquième Masters 1000 à son palmarès et d’aborder l’US Open dans les meilleures conditions possibles. En effet, il reste sur une belle série de 11 victoires consécutives. Une série qu’il compte bien poursuivre du côté de Flushing Meadows…
Capable de répondre présent dans les grands rendez-vous, il semble enfin avoir trouvé une constance pour briller durablement au tout meilleur niveau. Et à New York, où il espère bien effacer son traumatisme de l’an passé, il pourrait croiser le fer avec Novak Djokovic en demi-finales, comme à… Tokyo. Le Serbe ayant tellement l’expérience des finales en Grand Chelem, le jouer un match plus tôt ne peut être qu’une bonne nouvelle pour Zverev. Dans une demie, il y a forcément un peu moins de pression qu’en finale. Et si une telle affiche a bel et bien lieu, l’Allemand sera forcément un adversaire très dangereux… S’il peut stopper le «Djoker», il ne s’en privera pas. Actuellement, il a assurément les armes dans son jeu pour le battre. Et peut-être aussi un léger avantage psychologique après sa victoire olympique à Tokyo.
MEDVEDEV SAIT SE NOURRIR MIEUX QUE PERSONNE DE LA FOLIE DE FLUSHING
Si Alexander Zverev a le profil d’un vainqueur en Grand Chelem dans deux semaines, Daniil Medvedev n’a pas à rougir face à l’Allemand. Surtout qu’il se plaît aux États-Unis. C’est en effet dans le pays de l’Oncle Sam qu’il avait réalisé un été fabuleux il y a deux ans. C’est simple, le Russe avait atteint la finale dans chacun des quatre tournois de la tournée américaine. Et s’il s’était s’imposé à Cincinnati, il avait buté sur la dernière marche à Washington, Montréal et New York. Malgré un seul titre en quatre finale, le Moscovite avait démontré que le dur lui convenait à merveille. Et pour cause, ses frappes à plat, notamment ses gifles en coup droit, font des ravages sur cette surface.
Mais au-delà de son style de jeu qui parvient parfaitement à s’exprimer sur les courts américains, c’est aux États-Unis que Daniil Medvedev sait se transcender comme personne. Lors de l’US Open 2019, le Russe avait ainsi entretenu une relation tumultueuse avec le public américain. En effet, il avait d’abord quitté le court sous les huées du public new-yorkais au troisième tour, après un match lors duquel il était sorti de ses gonds avant de taquiner les spectateurs à l’issue de la rencontre. «Quand vous irez vous coucher ce soir, je veux que vous sachiez que j’ai gagné grâce à vous», avait ainsi lancé Medvedev au public avant de quitter le court. Sacré Daniil…
Mais l’histoire s’était bien terminée, quand le public new-yorkais avait été épaté par la résilience du Russe pour emmener Rafael Nadal au cinquième set d’une finale mémorable. Une finale finalement perdue, mais seulement rendue mythique par le refus de Medvedev de se résigner alors que l’Espagnol s’envolait facilement vers la victoire. Malgré la déception, le Russe avait été parfait dans son discours d’après-match. «Plus tôt dans le tournoi, j’ai dit quelque chose d’une façon assez négative. Maintenant, je le dis de façon positive : c’est grâce à votre énergie que j’étais en finale. Je garderai toujours cette soirée en mémoire. J’ai joué sur le plus gros court de la planète et dans le troisième set, alors que je pensais déjà au speech, vous m’avez poussé à prolonger ce match car vous vouliez voir plus de tennis et, grâce à vous, je me suis battu comme jamais», avait-il déclaré sur le court Arthur-Ashe.
Dans la foulée, le public new-yorkais lui avait réservé une énorme ovation. Car Medvedev, peut-être plus que quiconque, a compris comment il fallait se nourrir de l’énergie de la foule à Flushing pour se battre comme un lion. L’US Open sans public, ce n’est pas vraiment l’US Open… L’ambiance électrique qui y règne lorsque le public entre en fusion est incomparable sur le circuit. Et cela tombe bien, le Grand Chelem new-yorkais accueillera du public à 100% de sa capacité. Daniil Medvedev ne va pas s’en plaindre.
«NOUS SOMMES LÀ POUR EMPÊCHER DJOKOVIC DE REMPORTER L’US OPEN»
Actuellement en forme, puisqu’il reste sur un titre à Toronto et une demi-finale à Cincinnati, le Russe sait qu’il a une carte à jouer à Flushing Meadows. Surtout qu’il a disputé une deuxième finale de Grand Chelem en début d’année. Avec plus d’expérience, une surface qui lui convient à merveille et un public qui ne demande qu’à s’enflammer, les conditions semblent réunies pour voir Medvedev réaliser un US Open de folie. Toutefois, attention à ne pas devenir la caricature de soi-même…
Avec son caractère volcanique, le Russe va parfois trop loin quand il pète les plombs sur le court. A Tokyo et à Cincinnati, on a pu le voir particulièrement énervé. Même si dans l’Ohio, on peut comprendre qu’il se soit emporté après avoir heurté une caméra qui n’a rien à faire sur un court de tennis. Sorte de «John McEnroe» russe, Medvedev lâche parfois trop d’énergie dans ses craquages, au risque de perdre le fil de son match. Et à New York, il est facile de devenir rapidement fou dans une ville qui vous absorbe beaucoup d’énergie… Pour autant, le Russe connaît la recette pour s’en sortir dans la folie de «Big Apple». Et comme Zverev, il semble armé pour aller au bout cette année. «Nous sommes là pour l’empêcher de remporter l’US Open», a d’ailleurs déclaré Medvedev au sujet de Djokovic avant le coup d’envoi du Grand Chelem new-yorkais.
Il reste désormais à joindre le geste à la parole…