Dans une journée plus que compliquée à cause des conditions météorologiques très délicates, Roland-Garros a connu une fin de troisième tour assez chaotique. Interrompus pendant une bonne partie de l’après-midi, les matches n’ont pu reprendre que vers 17h15. Pour ceux qui ont eu la chance d’évoluer sous le toit du court Philippe-Chatrier, la gêne a été évidemment moindre. Et Caroline Garcia a su en profiter. Pour les autres, il fallait avoir un gros mental, un peu de folie, voire un soupçon d’irrationnel. Demandez plutôt à celui qui a d’ores et déjà l’étiquette de relève du tennis français, Hugo Gaston.

GASTON LA GAGNE

Un exploit majuscule, un mental d’acier et un physique inépuisable. Depuis son deuxième tour brillamment remporté face à Yoshihito Nishioka, la France du tennis a découvert Hugo Gaston. Mais s’il faut être totalement honnête, personne ne donnait cher de la peau du 239ème mondial face au Suisse Stan Wawrinka, vainqueur Porte d’Auteuil en 2015. Force est de constater qu’il ne faut pas se fier aux apparences. Le Français était pourtant assez mal rentré dans son match, en concédant rapidement la première manche (2-6). Plus concentré et plus efficace dans le deuxième set, il a su recoller (2-6, 6-3) avant une interruption qui aurait pu le sortir de son match.

Seulement aujourd’hui, Gaston était béni et rien ne pouvait lui arriver. Au moment de revenir sur le court, après plus de 2h20 de pause, le Français a réalisé une reprise canon. A deux jeux partout dans le troisième set, le Toulousain de 20 ans s’est envolé pour prendre les commandes de la partie (2-6, 6-3, 6-3). Tout était alors possible. Le public s’est mis à croire dur comme fer à l’exploit, mais le Français s’est montré moins précis, au contraire du Vaudois qui s’est vite échappé pour mener 3-0 dans la quatrième manche.

Le caractère du Toulousain lui a permis de revenir à 4-4, mais il a perdu son service au pire moment. Place donc à un cinquième set… Dans la configuration d’un match comme celui-ci, le dernier set n’aurait dû être qu’une simple formalité pour Wawrinka. Habitué aux matches à rallonge et vainqueur d’un combat épique l’an passé sur ce même court Suzanne-Lenglen contre Stefanos Tsitsipas, la victoire lui tendait les bras. Du moins, sur le papier. Surtout quand on sait que le Français de 20 ans jouait le tout premier match en cinq sets de sa jeune carrière. Mais de formalité pour Wawrinka, il n’y en a pas eu. Enfin, si. Mais pas celle qu’il espérait. En 29 minutes, Hugo Gaston a infligé un cinglant 6-0 à un Stan dérouté par ce scénario invraisemblable.

A la clé, un exploit retentissant et une qualification pour les huitièmes de finale pour celui qui n’avait encore jamais gagné un match sur le circuit principal. Ce vendredi, Hugo Gaston s’est révélé aux yeux de la France entière. Et il a déjà le droit à l’étiquette, ô combien lourde, de futur du tennis tricolore. Bravo Hugo, mais le plus dur commence peut-être maintenant. Après un bond de plus de 80 places à l’ATP, Gaston se sait désormais attendu. Les Français l’attendront. Une pression qu’il devra appréhender rapidement pour ne pas rejoindre le cimetière des étoiles filantes du tennis français. Au prochain tour, face à Dominic Thiem, le Toulousain va découvrir le Central de Roland, un rêve pour le gamin de 20 ans qui ne l’a toujours vu qu’à la télé. De quoi se faire plaisir.

Et nous faire rêver ?

THIEM-NADAL, LE RENDEZ-VOUS EST PRIS

Pour son premier vrai test, l’Autrichien n’est pas passé à côté. Face à Casper Ruud, tête de série n°28, le récent lauréat de l’US Open a bataillé 2h15. Pendant un set et demi, le Scandinave a posé de gros problèmes à Dominic Thiem, comme sur ce lob-tweener absolument magnifique. Le Norvégien s’est même procuré de nombreuses balles de break (8).

Fort heureusement pour le troisième joueur mondial, Ruud a fini par lever le pied et Thiem a pu prendre l’ascendant. Le troisième set n’était dès lors plus qu’une formalité. Casper Ruud, fatigué par l’intensité du combat, n’avait plus l’énergie pour se battre. Au final, l’Autrichien s’est imposé 6-4, 6-3, 6-1. Sans trembler mais avec un adversaire coriace, il a parfaitement réussi sa fin de première semaine et donne le ton pour la suite. Nadal est prévenu, leur demi-finale annoncée risque de faire des étincelles. Le taureau de Manacor est prêt et il lui a répondu sur le court.

Le match de Rafael Nadal contre Stefano Travaglia, prévu en dernière rotation sur le Chatrier, aurait pu donner quelques sueurs froides à l’Espagnol. Mais le dodécuple vainqueur Porte d’Auteuil n’a pas tremblé une seule seconde. Après 1h35 de jeu, Rafa l’a emporté facilement 6-1, 6-4, 6-0. Circulez, il n’y a rien à voir. Ou pour ses futurs adversaires, il suffit de voir ses statistiques face à Travaglia pour claquer des dents. Le Majorquin a gagné deux fois plus de points que son adversaire (80 contre 41) et n’a commis que 13 petites fautes directes, soit à peine plus d’une tous les deux jeux. Y a-t-il encore quelqu’un pour douter du statut d’archi-favori du triple tenant du titre ? Si tant est qu’il y en ait eu, nul doute que leur jugement doit être quelque peu révisé. Au prochain tour, il affrontera l’étonnant Sebastian Korda, 213ème à l’ATP.

Il y a de quoi craindre le pire pour le jeune Américain…

REPRENDRE CONFIANCE

Après un deuxième tour des plus ardus face à Pierre-Hugues Herbert, Alexander Zverev avait besoin de se rassurer. Face à Marco Cecchinato, qui n’avait plus passé un tour en Grand Chelem depuis son parcours formidable à Paris il y a deux ans, l’Allemand jouait gros. Et il a gagné. En moins de deux heures et en trois sets, il s’est ainsi rassuré. En huitièmes de finale, il retrouvera un autre Italien, Jannik Sinner, qui pourrait lui poser davantage de problèmes. Le prodige de 19 ans n’a toujours pas perdu le moindre set à Roland-Garros cette année. De quoi espérer un duel de haut vol.

Un autre Italien, Lorenzo Sonego, s’est lui aussi qualifié en trois manches en disposant de Taylor Fritz. Mais ce fut une toute autre histoire. Le natif de Turin est allé arracher sa place en huitièmes au bout du tie-break. Au bout du bout, du bout, du bout… Et pour cause, il a remporté ce jeu décisif sur l’improbable score de 19-17 après 23 minutes de bagarre. Au total, le dernier set aura duré près de 80 minutes… Il s’est ainsi qualifié en trois manches, 7-6 (5), 6-3, 7-6 (17), mais 3h07 de jeu ! Soit trois petites minutes de moins passées sur le court qu’Hugo Gaston qui a battu Wawrinka en cinq sets.

GARCIA EN PATRONNE

Caroline Garcia, impressionnante de détermination, a écarté une sacrée cliente en la personne d’Elise Mertens. La tête de série n°16 avait pourtant démarré son match de manière idéale face à la Française, enlevant rapidement le premier set (6-1). Sauf que cette année, Caroline Garcia fait preuve d’un mental à toute épreuve. Il y a comme un parfum de 2018, lorsque la Lyonnaise avait atteint le quatrième rang mondial. Efficace comme jamais sur le court, elle a su profiter du jeu prudent de son adversaire pour revenir dans la partie.

La Belge a ainsi laissé Garcia faire le jeu, ce qui lui a coûté la victoire. Avec 38 coups gagnants, la Française a logiquement composté son billet pour les huitièmes de finale. Elle y affrontera Elina Svitolina, tête de série n°3. Autant dire que Caroline Garcia aura fort à faire pour battre l’Ukrainienne, qui s’était débarrassée d’Ekaterina Alexandrova un peu plus tôt dans la journée. Il faudra une prestation majuscule de la Lyonnaise pour rejoindre les quarts de finale et égaler son meilleur résultat sur l’ocre parisien. Mais l’espoir est permis. A priori plus que pour Iga Swiatek.

La Polonaise, tombeuse d’Eugenie Bouchard, affrontera Simona Halep dimanche. Et elle peut déjà trembler… Car la Roumaine, deuxième mondiale, avait un vrai test à passer. Face à Amanda Anisimova, qui l’avait éliminée en quarts de finale l’an passé, Halep a pris une éclatante revanche. Battue 6-2, 6-4 il y a 18 mois Porte d’Auteuil, la tête de série n°1 n’a cette fois fait qu’une bouchée de la jeune et prometteuse Américaine. Victoire 6-0, 6-1 en 54 minutes. La pancarte de favorite du tournoi est désormais bien accrochée à Simona Halep.

Pas sûr que cela lui pose problème, bien au contraire. En quarts de finale, elle pourrait tout de même retrouver l’immortelle Kiki Bertens. On avait laissé la Néerlandaise sur un fauteuil roulant, incapable de marcher après son match épique face à Sara Errani. Il faut reconnaître que son kiné a dû faire un travail extraordinaire. Face à la Tchèque Siniakova, la tête de série n°5 n’a pas eu le moindre souci. 6-2, 6-2 en moins d’une heure, de quoi se remettre en jambes tranquillement.