On connaissait les capacités de Daniil Medvedev à se dépasser pour mener la vie dure à ses adversaires. Force est de constater que sa niaque n’a pas disparu avec l’épidémie de coronavirus. Toute la semaine, le cinquième joueur mondial n’a pas tremblé pour rallier la finale à Bercy. Malgré un set perdu en huitièmes de finale contre Alex De Minaur, le Russe s’est toujours montré solide, découpant Diego Schwartzman 6-3, 6-1, et tenant le choc face a Milos Raonic. Zverev avait, lui, connu un parcours plus sinueux pour rejoindre son aîné. Le match le plus dur de sa semaine parisienne a sans nul douté été celui disputé face à Adrian Mannarino. Sa victoire 7-6 (11), 6-7 (7), 6-4, en trois heures pile lui aura couté beaucoup d’énergie, certainement celle qui a manqué en fin de match ce dimanche.

La veille, l’Allemand s’était pourtant payé le luxe de sortir Rafael Nadal en deux sets. L’Espagnol, toujours incapable de gagner en indoor à Paris, a peut-être manqué l’occasion parfaite de soulever «L’Arbre de Fanti», l’un des trois trophées en Masters 1000 absents (avec Miami et Shanghaï) de sa vitrine par ailleurs bien garnie, avec notamment 13 Coupes des Mousquetaires. A 23 ans, Zverev venait de s’offrir la première victoire de sa carrière contre Nadal en sept confrontations. Un bel accomplissement pour celui qui compte déjà 13 titres sur le circuit, et qui restait sur une impressionnante série de 21 victoires en 23 matches disputés avant la finale de dimanche.

Titré à deux reprises en octobre à Cologne, où deux tournois étaient organisés coup sur coup, Alexander Zverev arrivait à Paris avec le plein de confiance. Au moment de rentrer sur le court, la balance penchait logiquement du côté de l’Allemand, d’autant plus quand on sait que Daniil Medvedev n’avait gagné que trois matches avant le tournoi depuis son échec retentissant au premier tour de Roland-Garros et n’avait pas disputé la moindre finale cette saison. Mais les éternelles limites mentales de Zverev promettaient avant même le début de la rencontre un suspense entier…

DUEL AU SOMMET

Les deux joueurs mesurent exactement la même taille et culminent à 1m98, de quoi faire parler la poudre au service, et ça n’a pas loupé. D’entrée de match, les deux hommes se répondaient du tac au tac, enchaînant les aces et les services gagnants. Peu de points dépassaient ainsi les neufs coups de raquette. Mieux en jambes, le cadet a mis une belle pression sur son aîné. Au bord de la rupture, Daniil Medvedev a bien tenté de résister, mais a légèrement levé le pied au pire moment. Sans se faire prier, Zverev a logiquement empoché le premier set 7-5 en 42 minutes, en ne commettant que cinq fautes directes. Si Alexander Zverev était le plus fort dans la première manche, le Russe est revenu aux affaires avec de bien meilleures intentions dès l’entame du second acte. Dans le même temps, Zverev a connu un peu moins de réussite. Résultat, les débats se sont équilibrés et le combat est devenu de plus en plus rude.

Alexander Zverev a connu ses premiers accrocs, sa première double arrivant dès le troisième jeu du deuxième set, à 40A. Même s’il a sauvé quatre balles de break pour finalement gagner le jeu, il aura eu besoin de 15 minutes d’un combat acharné pour virer en tête. Si Medvedev pouvait s’en vouloir tant il a gâché, l’Allemand a lui aussi montré qu’il était friable. Et c’est finalement à quatre jeux partout que Medvedev a pris le service de son adversaire, sur sa cinquième occasion. Après avoir survolé le set sur sa mise en jeu (4 points perdus seulement), le Russe est revenu à hauteur en claquant son onzième ace. Le septième joueur mondial a une nouvelle fois craqué au moment de gravir la dernière marche, comme à l’US Open…

BALADE ET DÉROUTE

Poursuivant sur sa lancée, Daniil Medvedev n’a fait qu’une bouchée d’un Zverev hagard et désabusé au début de l’ultime set. Il a d’abord pris le service de son adversaire, blanc, d’entrée de troisième manche. Sur le jeu suivant, alors que le finaliste de l’US Open avait l’occasion de recoller au score, le Russe a effacé quatre balles de débreak et sonné le glas des espoirs de Zverev. Double-breaké dans la foulée, Zverev a rendu les armes. Le jeune Allemand a perdu 9 des 10 derniers jeux. Totalement apathique et hors du coup en fin de match, il a offert la victoire à Daniil Medvedev sur une désormais double-faute.

A l’arrivée, cela donne donc une victoire du Russe 5-7, 6-4, 6-1, en deux heures et sept minutes de jeu. Auparavant, la seule fois où les deux hommes avaient disputé un set décisif, c’est l’Allemand qui l’avait emporté, au tie-break, à Miami en 2018. Le moins que l’un puisse dire, c’est que Medvedev a su parfaitement conjurer le sort pour remporter son troisième Masters 1000, soit autant que son adversaire du jour.

Déçu mais pas abattu, le plus jeune des deux n’a eu aucun regret, conscient du travail accompli avec son équipe durant cette année si particulière. Désormais il le sait, il a le tennis pour briller jusqu’au sommet du tennis mondial, lui qui a déjà été n°3 à l’ATP et qui pointe actuellement à la septième place du classement mondial. C’est mentalement que l’Allemand à pêché, comme souvent, et c’est là qu’il doit travailler.

LE MASTERS DANS LE VISEUR

Pour Medvedev, la fin de saison semble s’éclaircir. Lui qui n’a pas été impérial en cette saison 2020, jusque-là vierge de tout titre, apprécie d’autant plus un trophée mérité. «Je me plaignais beaucoup auprès de ma femme d’avoir fait une année un peu pourrie sans finale à jouer, sans produire un jeu au niveau de ce que j’avais pu faire l’an passé. Ce titre fait vraiment du bien, il représente beaucoup pour moi», a confié le Russe à Eurosport juste après sa victoire. De quoi le rebooster et finir l’année en trombe ?

L’année dernière, Medvedev était arrivé à bout de souffle à Londres pour disputer le Masters et s’était incliné lors de chacun de ses matches de poule, notamment contre… Alexander Zverev. Le désormais n°4 mondial (son meilleur classement) compte bien faire plus que de la figuration cette année et pourquoi pas imiter sa victime du soir en soulevant le trophée (Zverev avait remporté le Masters en 2018 à seulement 21 ans). Réponse à partir du 15 novembre à l’O2 Arena pour la dernière édition britannique du «Tournoi des maîtres».